Initiatives pour la sauvegarde de la lagune de Bizerte

Ecrit par Wajdi Dhib, Chef de projets, Tunis

Le projet « AGIR AGRI : Initiatives pour la sauvegarde de la lagune de Bizerte via une agriculture environnementale », s’est déroulé entre juin 2021 et avril 2023 dans le Gouvernorat de Bizerte, dans les délégations de Menzel Bourguiba et de Menzel Jemil. Il avait pour objectif de contribuer à la réduction des intrants polluants accumulés dans le bassin versant de la lagune de Bizerte. Il s’agit  de restaurer la qualité des eaux de la lagune de Bizerte par la réhabilitation des écosystèmes à travers l’instauration des modèles de bonnes pratiques agricoles afin de contribuer à la réduction de la pollution d’origine agricole. Il a été financé par le programme ECOPACT Lac de Bizerte, le Ministère de l’environnement et l’Union Européenne. Ce projet a été mené par l’ATAE en collaboration avec l’association Les Amis de CAPTE Tunisie.

Le projet AGIR AGRI a été un catalyseur pour initier un changement dans la région, apportant des alternatives et des solutions afin de  limiter la pollution agricole mais aussi pour promouvoir une agriculture plus durable, respectueuse de l’environnement. En alternant démonstrations, ateliers, formations pratique et sensibilisation, le projet AGIR AGRI a pu diversifier ses activités pour toucher diverses cibles. Voici un aperçu du contenu du projet, des résultats atteints, de ses retombées pour les agriculteurs et de ce qui se profile à l’horizon.

Le projet AGIR AGRI a été conçu comme une réponse à l’initiative ECOPACT : un programme de dépollution du bassin versant de la lagune de Bizerte et d’amélioration de la qualité des eaux du lac et de ses écosystèmes. Les composantes clés du projet AGIR AGRI comprennent :  

  • Formation en bonnes pratiques agricoles : les agriculteurs ont participé à des ateliers divers sur les pratiques agricoles durables, le réglage des machines agricoles, le semis direct, la rotation des cultures ainsi que la taille des oliviers et leurs traitements par des produits naturels non polluants.
  •  Lutte biologique : l’une des innovations notables du projet est l’introduction de méthodes de lutte biologique pour contrôler les ravageurs des cultures. Cela réduira la dépendance aux pesticides et améliore la santé des sols.
  • Accès à des semences de qualité : le projet a fourni aux agriculteurs des semences de qualité supérieure adaptées à la région afin de créer un méteil composé de céréales et légumineuses. Cette couverture végétale joue un double rôle d’augmentation de la production fourragère mais aussi de fertilisation des sols par les légumineuses tout en stimulant la biodiversité microbienne des sols et l’élimination des produits phytosanitaires et désherbants.
  • Des plantations d’arbres forestiers adaptés au climat local pour la création de haies arbustives limitant le ruissèlement des eaux mais aussi améliorant la biodiversité des parcelles. Nous avons planté des arbres sur le bord d’un oued d’une longueur de 1,5 km afin de limiter l’érosion et l’élargissement de l’oued au dépend des parcelles agricoles fertiles de la région. Ces plantations doivent aussi à long terme freiner les courants d’eau polluée par les intrants chimiques agricoles qui se déversent directement dans la lagune de Bizerte. Au total, ce sont plus de de 6000 arbres forestiers qui ont été plantés chez quatre agriculteurs.
  • Enfin la sensibilisation auprès des jeunes : écoliers, collégiens et étudiants. Une journée terrain a été réalisée avec des élèves et collégiens sur l’importance et le rôle des arbres dans la préservation de l’environnement. Une visite des élèves scouts de la communauté locale a été organisée pour l’initiation de jeunes étudiants universitaires scouts à l’économie circulaire.

Le projet AGIR AGRI a déjà atteint des résultats prometteurs depuis son lancement. Les chiffres parlent d’eux-mêmes :

  • Augmentation des rendements : en moyenne, les rendements agricoles fourragers ont augmenté de 30 % depuis le début du projet chez les agriculteurs concernés par le projet. Cela a eu un impact significatif sur les revenus des agriculteurs, leur donnant un pouvoir d’achat supplémentaire pour subvenir aux besoins de leur famille.
  • Réduction de l’utilisation de pesticides : l’introduction des méteils a permis de réduire l’utilisation de pesticides chimiques. Cela a non seulement préservé la santé des agriculteurs, mais a également contribué à la protection de l’environnement.
  • Acquisition de nouvelles techniques durables et respectueuses de l’environnement faciles à appliquer comme les bonnes techniques de taille des oliviers.
  • Développement des arbres plantés en haie mais aussi sur le bord de l’oued avec un taux de réussite assez encourageant malgré les extrêmes climatiques, la forte chaleur et le manque de précipitation.

En résumé, le projet a permis de mettre en place :

  • plus de 11 ha de méteils,
  • 6000 arbres forestiers,
  • une dizaine d’ateliers et formations qui ont mobilisé pas moins de 500 participants,
  • deux journées de sensibilisation pour les jeunes mobilisant 60 élèves âgés de 8 à 16 ans,
  • mais aussi la participation à un évènement organisé par les scouts tunisiens sur l’économie circulaire mobilisant pas moins de 100 étudiants.

 

Le succès du projet AGIR AGRI est un exemple pour la transformation durable du secteur agricole. Alors que le projet entre dans sa phase finale, l’avenir s’annonce prometteur. Voici ce qui se profile à l’horizon :

  • Pérennisation des pratiques durables : les pratiques agricoles durables intégrées dans le projet devraient perdurer au-delà de la fin du projet. Les agriculteurs sont maintenant pleinement engagés dans ces approches.
  • Expansion des initiatives : l’impact positif du projet s’étend au-delà des agriculteurs, touchant les communautés dans leur ensemble. De nouvelles initiatives ont émergé, comme des suites au projet, portées par l’ATAE et par l’association les Amis de CAPTE Tunisie.

En fin de compte, le projet AGIR AGRI est une histoire de transformation. Les agriculteurs ont pris le rôle central dans cette aventure, adoptant de nouvelles pratiques pour cultiver un meilleur avenir, plus durable. Le projet a montré que la durabilité agricole est une réalité atteignable, offrant un modèle à suivre pour d’autres régions. Les retombées positives sur les agriculteurs, la communauté et l’environnement ne font que commencer.